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Un peu de poésie :.




     Le roman La Communauté des esprits comporte plusieurs références à de la poésie, notamment française et alors citée dans la langue de Molière. Rendus curieux par ces brefs extraits, nous sommes allés chercher les textes intégraux...

     ATTENTION ! Cette page contient des SPOILERS !


Textes présentés:
Mignonne - Pierre de Ronsard -

     En voyage à Genève, Malcolm doit s'enfuir à bord d'une petite embarcation nommée Mignonne. Etant donnée la place de la rose au coeur de l'intrigue du roman, le renvoi au poème de Pierre de Ronsard (1524-1585), composé en 1545 à destination de Cassandre Salviati et publié dans ses Odes en 1550, s'impose plus ou moins...

Ode à Cassandre

Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vesprée,
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil.

Las ! voyez comme en peu d’espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las, las ses beautés laissé cheoir
Ô vraiment marâtre Nature,
Puis qu’une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !

Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que votre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez votre jeunesse :
Comme à cette fleur la vieillesse
Fera ternir votre beauté.

     Vous pouvez accéder à l'édition originale des Odes de Ronsard au format numérique sur le site des Bibliothèques Virtuelles Humanistes (Université de Tours), ici.

Le Cor - Alfred de Vigny

     En difficulté dans le train qui l'emporte loin de Seleukeia, Lyra utilise la poésie française comme refuge pour répondre à des questions qu'elle ne comprend pas et repousser une terreur croissante. Le premier texte qu'elle utilise est Le Cor, composé par Alfred de Vigny (1797-1863) à Pau en 1825 et publié l'année suivante dans le recueil Poèmes antiques et modernes. Le poème se construit autour de la légende de Rolland. Lyra en cite le premier et le dernier vers, qui en sont aussi probablement les plus connus...
     

Le Cor

I

J’aime le son du Cor, le soir, au fond des bois,
Soit qu’il chante les pleurs de la biche aux abois,
Ou l’adieu du chasseur que l’écho faible accueille,
Et que le vent du nord porte de feuille en feuille.

Que de fois, seul, dans l’ombre à minuit demeuré,
J’ai souri de l’entendre, et plus souvent pleuré !
Car je croyais ouïr de ces bruits prophétiques
Qui précédaient la mort des Paladins antiques.

Ô montagne d’azur ! ô pays adoré !
Rocs de la Frazona, cirque du Marboré,
Cascades qui tombez des neiges entraînées,
Sources, gaves, ruisseaux, torrents des Pyrénées ;

Monts gelés et fleuris, trône des deux saisons,
Dont le front est de glace et le pied de gazons !
C’est là qu’il faut s’asseoir, c’est là qu’il faut entendre
Les airs lointains d’un Cor mélancolique et tendre.

Souvent un voyageur, lorsque l’air est sans bruit,
De cette voix d’airain fait retentir la nuit ;
À ses chants cadencés autour de lui se mêle
L’harmonieux grelot du jeune agneau qui bêle.

Une biche attentive, au lieu de se cacher,
Se suspend immobile au sommet du rocher,
Et la cascade unit, dans une chute immense,
Son éternelle plainte au chant de la romance.

Âmes des Chevaliers, revenez-vous encor ?
Est-ce vous qui parlez avec la voix du Cor ?
Roncevaux ! Roncevaux ! Dans ta sombre vallée
L’ombre du grand Roland n’est donc pas consolée !

II

Tous les preux étaient morts, mais aucun n’avait fui.
Il reste seul debout, Olivier près de lui,
L’Afrique sur les monts l’entoure et tremble encore.
« Roland, tu vas mourir, rends-toi, criait le More ;

Tous tes Pairs sont couchés dans les eaux des torrents. »
Il rugit comme un tigre, et dit : « Si je me rends,
Africain, ce sera lorsque les Pyrénées
Sur l’onde avec leurs corps rouleront entraînées.

— Rends-toi donc, répond-il, ou meurs, car les voilà. »
Et du plus haut des monts un grand rocher roula.
Il bondit, il roula jusqu’au fond de l’abîme,
Et de ses pins, dans l’onde, il vint briser la cime.

« Merci, cria Roland ; tu m’as fait un chemin. »
Et jusqu’au pied des monts le roulant d’une main,
Sur le roc affermi comme un géant s’élance,
Et, prête à fuir, l’armée à ce seul pas balance.

III

Tranquilles cependant, Charlemagne et ses preux
Descendaient la montagne et se parlaient entre eux.
À l’horizon déjà, par leurs eaux signalées,
De Luz et d’Argelès se montraient les vallées.

L’armée applaudissait. Le luth du troubadour
S’accordait pour chanter les saules de l’Adour ;
Le vin français coulait dans la coupe étrangère ;
Le soldat, en riant, parlait à la bergère.

Roland gardait les monts ; tous passaient sans effroi.
Assis nonchalamment sur un noir palefroi
Qui marchait revêtu de housses violettes,
Turpin disait, tenant les saintes amulettes :

« Sire, on voit dans le ciel des nuages de feu ;
Suspendez votre marche ; il ne faut tenter Dieu.
Par monsieur saint Denis, certes ce sont des âmes
Qui passent dans les airs sur ces vapeurs de flammes.

Deux éclairs ont relui, puis deux autres encor. »
Ici l’on entendit le son lointain du Cor. —
L’Empereur étonné, se jetant en arrière,
Suspend du destrier la marche aventurière.

« Entendez-vous ! dit-il. — Oui, ce sont des pasteurs
Rappelant les troupeaux épars sur les hauteurs,
Répondit l’archevêque, ou la voix étouffée
Du nain vert Obéron qui parle avec sa Fée. »

Et l’Empereur poursuit ; mais son front soucieux
Est plus sombre et plus noir que l’orage des cieux.
Il craint la trahison, et, tandis qu’il y songe,
Le Cor éclate et meurt, renaît et se prolonge.

« Malheur ! c’est mon neveu ! malheur ! car si Roland
Appelle à son secours, ce doit être en mourant.
Arrière, chevaliers, repassons la montagne !
Tremble encor sous nos pieds, sol trompeur de l’Espagne ! »

IV

Sur le plus haut des monts s’arrêtent les chevaux ;
L’écume les blanchit ; sous leurs pieds, Roncevaux
Des feux mourants du jour à peine se colore.
À l’horizon lointain fuit l’étendard du More.

« Turpin, n’as-tu rien vu dans le fond du torrent ?
— J’y vois deux chevaliers : l’un mort, l’autre expiranr
Le plus fort, dans sa main, élève un Cor d’ivoire,
Son âme en s’exhalant nous appela deux fois. »

Dieu ! que le son du Cor est triste au fond des bois !


Le même texte sur Gallica dans l'édition originale du livre d'Alfred de Vigny :
Correspondances - C. Baudelaire

     Au cours de la même séquence que précédemment, Lyra fait aussi appel à un sonnet de Charles Baudelaire (1821-1867), Correspondances, extrait des Fleurs du Mal publié en 1857.

Correspondances

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.

Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.

Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.



El Desdichado - G. de Nerval

     Au moment de discuter de l'état d'esprit dans lequel ils trouvent Lyra, Asta utilise au chapitre 18 de La Communauté des esprits l'expression "soleil noir de la mélancholie, en français dans le texte. Cette expression est extraite du poème El Desdichado de Gérard de Nerval, publié dans le recueil Filles du feu en 1854.

     Une petite étude du texte offrira aux serviteurs de Lyra que nous sommes de nombreuses occasions de s'émerveiller des multiples liens qu'il tisse avec la saga de Pullman : l'évocation de la lyre et de la rose, de Lusignan dont le nom renvoie à Bonneville, de la traversée de l'Archéron, la fée ou le titre même du recueil dont il est issu (fille du feu, n'est-ce pas Ma Costa ?)...
     Et encore, on n'en reste là qu'à la surface... Hasard, surinterprétation ou air de Jahan et Rukhsana appliqué aux aventures de Lyra ? A vous de décider !

El Desdichado

Je suis le ténébreux,- le Veuf, - l'inconsolé,
Le Prince d'Aquitaine à la tour abolie
Ma seule étoile est morte, et mon luth constellé
Porte le soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé,
Et la treille où le Pampre à la rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phoebus ?.... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J'ai rêvé dans la grotte où nage la Sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée

Le même texte sur Gallica dans l'édition originale du recueil de G. de Nerval :
Sources et copyrights
Tous les textes ici présentés sont dans le domaine public.
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Création : octobre 2019
Dernière MAJ: 12 juin 2020

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