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  La Belle Sauvage (Trilogie de la Poussière 1)

Philip Pullman

La Belle Sauvage (Trilogie de la Poussière 1)

Détails :
  • Titre original : La Belle Sauvage
  • Traducteur : Jean Esch
  • Editeur (France) :
    Gallimard Jeunesse
  • Première publication :
    19 octobre 2017
  • Publication française :
    16 novembre 2017
  • 544 pages
  • Ventes France : 50.000ex (été 2020)

 


La Belle Sauvage, c’est l’œuvre d’un auteur qui a accumulé vingt ans d’expériences supplémentaires depuis la création de son univers, le livre d’un auteur qui sait raconter des histoires et s’essaie à de nouveaux genres ; ce retour vers cet univers alternatif qu’il s’est créé repose ainsi sur un étrange et délicat équilibre – une réinvention plutôt qu’une simple exploitation de ses codes, car Pullman a ajouté à son creuset thèmes, idées et trames pour composer de nouveaux tableaux.

Bien sûr, il est question de daemons et d’aléthiomètres (on nous l’avait déjà promis) et en second plan défilent une foule d’éléments familiers qui donnent au lecteur l’impression d’être ici chez lui. Mais la première chose qui frappe, c’est que l’Oxford qui nous est offert aujourd’hui est en un certain sens inédit, sombre et inquiétant. La différence avec Les Royaumes du Nord réside dans le choix de la perspective. Si Lyra vivait dans l’existence feutrée d’un collège où tout le monde la servait et était (à de rares exceptions près) le point central de toute la séquence d’Oxford, Malcolm a une vie relativement sociale où il absorbe plus aisément le monde de plus en plus policé qui l’entoure. La noirceur du contexte est en outre accentuée par le choix de Pullman de s’intéresser (et nous questionner) aux problématiques qui échappent à Malcolm mais rongent les adultes : mettre hors d’état de nuire un système abject nous autorise-t-il à employer des moyens abjects ? Ainsi, en souhaitant expliquer comment nous en sommes venus aux Enfourneurs des Royaumes du Nord, Pullman en revient à des thèmes qui lui sont chers (dogmes, contrôle de l’opinion, répression intellectuelle, embrigadement…) mais s’offre aussi un boulevard pour inclure une tonalité marquée de roman d’espionnage (la préparation des aventures dessinées de John Blake n’y est peut-être pas étrangère). Mais la noirceur ne s’arrête pas à l’atmosphère : le roman est également sombre et violent dans les actes qu’il décrit. Il est ici question de meurtre, de sexe et d’agression sexuelle. De quoi secouer les jeunes protagonistes.

Un autre constat immédiat est la tonalité animiste du récit. Pullman s’y était déjà adonné avec sorcières et chamans, mais le constat est encore plus flagrant avec ce livre. Cela peut déstabiliser – et le couvert sera probablement remis dans les tomes suivant – mais c’est finalement une évolution assez logique : depuis sa dernière incursion chez Lyra, l’auteur a assuré une réécriture d’une cinquantaine de contes des frères Grimm et a pu s’exprimer assez ouvertement sur l’intérêt des contes dans sa conception de la narration. Outre les personnages et concepts nouveaux qui se glissent dans le récit, la nature elle-même devient un personnage à part entière. Pendant la première moitié de l’ouvrage les protagonistes regardent d’un œil inquiet le niveau des rivières monter avant qu’une crue violente n’affecte toute la seconde moitié de l’ouvrage. Les inondations font remonter des choses à la surface et en déclenchent d’autre, écrit l’auteur noir sur blanc. Dans notre cas, le gros de l’action démarre à proprement dit avec la crue, et il y est alors énormément question d’éléments : eau, feu, air et terre sont tour à tour atouts et obstacles…

Mais au-delà de toutes ces bulles de champagne qui pétillent à travers les mailles de l’histoire, au-delà des éléments brillants que Pullman a picoré ici et là et qui ressortent du récit à qui veut bien les chercher, reste évidemment et avant tout le plus important : une histoire prenante, rythmée, construite qui se savoure dans un premier temps pour le plaisir de l’odeur et du goût, puis se dévore ensuite par faim et volonté de ne plus s’arrêter en si bon chemin : Pullman démarre son récit à coups de pinceaux lents, met en place ses personnages, ses enjeux, son contexte, ses questions. Les relations se construisent, les ressorts se tendent, la respiration est retenue… puis l’eau déferle et l’action ne s’arrêtera plus, jusqu’à l’ultime page. Les personnages marquent, Malcolm et Alice sont admirables (le langage d’Alice est un bonheur, espérons que la traduction saura le préserver), le ton est vif et régulièrement narquois (une phrase magnifique sur les athées qui deviennent célèbres… ou une description qui déclenchera une nouvelle guerre de Troie au sein des lecteurs de la première heure) et l’auteur fait le chemin entre émerveillement et noirceur à double sens en quelques lignes. Dans cet univers qui n’a jamais été aussi proche de Miyazaki, l’excursion en compagnie d’un conteur inspiré s’avère un vrai plaisir.

Reste désormais à regarder l’avenir. Des suites, il en est régulièrement question puisque Pullman laisse des petits cailloux pour l’œil attentif du lecteur. Pullman annonce élégamment le retour d’un personnage pour les prochains tomes, fait plusieurs références à la partie du monde où devrait s’expatrier le récit et il y a enfin cette expression, the secret commonwealth, évoquée au détour d’une phrase qui n’a d’autre intérêt que cette expression, et qui une fois le livre lu, semble être assez révélatrice de ce qu’on pourra attendre comme thématiques futures. Puis il y a les questions, nombreuses, qui émergent du récit. L’heure est venue de spéculer, de discuter, de conjecturer, bref, d’échanger et de se montrer curieux. Tout ce qui a fait le sel de la première trilogie de l’auteur...


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