La Boussole d’Or, conclusion
Par David Allen
Ce qui a marché, ce qui a moins bien fonctionné
Les plus grands défis, comment ils ont été surmontés
Comment votre rôle a contribué à façonner le jeu
Ce dont vous êtes le plus fier
Bizarre. Voilà comment je me sens. J'ai finalement vu le film de la manière dont Chris Weitz et son équipe désiraient le voir vu. Jusqu'alors, j’avais regardé les séquences non éditées, avec lesquelles nous avions travaillé pour créer les nombreuses bandes-annonces que nous avons faites, ainsi que les extraits du jeu qui guident le lecteur à travers l'histoire. Le jeu est en magasins depuis un moment et l'écriture de ce dernier chapitre sur mon blog La Boussole d’Or sera mon dernier travail sur ce projet. C'est terminé. Le sort en a été jeté et le résultat est… bizarre.
Depuis fin août 2006, La Boussole d’Or a été ma vie. J'ai été complètement focalisé dessus. En fait, ça a été un changement de vie de bien des façons. J'ai changé d'emplois et même de continents au cours des quelque 70 dernières semaines remplies d’actions et d’aventures. Et maintenant… une Boussole d’Or achevée apparaît dans son ensemble, et je suis épuisé. Je ne cherche même pas à savoir comment l'équipe de développement de produits, ici à SEGA, et les gars à Shiny se sentent. Ni d'ailleurs ce que Chris Weitz éprouve maintenant que sa tentative d’une adaptation de livre vraiment difficile – et dont il a beaucoup été discuté – est réalisée.
Je ne vais pas dire trop de choses sur le film. Vous l'avez vu à présent de toute façon, mais si, pour d’étranges raisons, ce n’était pas le cas, je ne veux rien gâcher. Les changements de structure de l’intrigue sont bien documentés et ils m'ont toujours pris un peu de court, mais si vous cherchez à les voir avec un regard neuf, alors ça fonctionne sans le moindre doute, et je crois que le niveau est admirablement prêt pour Le Poignard Subtil. (Oh, et cela signifie également que le jeu contient un aperçu de quelques séquences non utilisées dans le film.) Tout ce que je dirai est que le film m’a semblé super et est passé très vite. On ne s'ennuie jamais. Je l’ai regardé avec un large sourire sur le visage, et le mot "wow" n'était jamais loin de mon esprit. Comme un divertissement.
Quant à ma petite, toute petite part dans la grande machine, ce fut un tour de montagnes russes. Produire un jeu lié à un film est toujours un défi et est très différent d’une production de jeu de la manière habituelle - avoir une idée de jeu, faire le jeu, sortir le jeu. Mais c’est le pied. Ca doit l’être – Je viens de m’engager pour faire Iron Man et The Incredible Hulk, que publiera SEGA quand ces deux films sortiront, plus tard dans l’année. Et c'est une partie du défi. Nous ne sommes pas dans le contrôle de notre propre destin, lorsque nous faisons un jeu lié à un film. Soyons honnêtes ! J'ai beaucoup trop simplifié le processus de fabrication d'un jeu. Tout jeu à faire est une entreprise colossale, après tout, vous essayez essentiellement de faire en sorte que des tas de uns et de zéros ressemblent et se comportent comme des objets 3d physiques. Mais ajoutez une date de lancement délimitée liée à la sortie de film, et le fait qu'une grande partie de l'inspiration pour le jeu vienne directement du film – qui fonctionne sur un tout autre planning, alors ça devient vraiment intéressant. Donc, ça a été une lutte acharnée tout le long, agréable, mais rude tout de même.
Le plus grand défi a été ensuite de quémander, voler et emprunter des biens et de recueillir des informations pour répondre aux questions que posait Shiny, n'étant pas toujours auprès des producteurs du film. Parfois, vous êtes coincé entre le marteau et l'enclume en tant que collecteur de données, lorsque le jeu a besoin de se déplacer, ou de verrouiller certains éléments où la réalisation concrète du film n'existe simplement pas.
Inversement, dans certains cas, il y avait un peu trop d’éléments et des mises à jour à gérer. Surtout que les trois quarts du film ont été générés par ordinateur. Cela amenait ses propres problèmes. De temps en temps je pouvais manquer quelque chose dans la mise à jour et devais dire à l'équipe de faire un peu machine arrière et de procéder à des changements. Parfois, on a tout bonnement dû renoncer – jetez un œil sur l’armure de Iorek dans le film par rapport au jeu. Le film a connu plusieurs révisions – parce qu'ils ont eu le luxe relatif du temps, en n'ayant pas eu à présenter leur travail à des tiers, tels que Sony, Microsoft et Nintendo – bien avant la date de sortie. Nous avons apporté plusieurs changements en lignée avec le film. Tous sauf un, en fait. Le dernier ! À la réflexion ce n'est pas un gros problème, mais l'équipe a voulu mettre les détails au point, alors il était décevant d’annoncer que l’armure de Iorek avait changé dans le film à un moment où nous ne pouvions plus faire ces révisions – une ÉNORME entreprise – dans le jeu.
À ce sujet, je ne crains pas de dire j’étais "nerveux" à propos du visionnage du film final, à la projection de Los Angeles. Que faire, si j’avais manqué beaucoup de changements clés dans les effets spéciaux, par exemple, et que le jeu semblait être de façon drastique en décalage avec le film ? Qu’aurait dit Shiny ? Qu’aurait dit New Line ? Qu’auraient dit les fans garçons et filles sur le forum ? Heureusement, il y avait seulement un ou deux moments de léger inconfort et j'ai pu fraterniser avec l'équipe de Shiny par la suite, sans craindre d’avoir mes membres arrachés.
Dans l'ensemble, je dirais que c'est assez bien réussi en ayant un "collecteur de données" (j’énoncerais cela même si je ne l’étais pas !). Je pense que la plus grande récompense est venue des relations personnelles que j'ai pu développer avec les producteurs du film en étant sur le plateau durant le tournage. Cela a payé plus tard, en ayant par exemple accès aux extraits du film pour les scènes coupées du jeu. Naturellement, nous voulions que les clips soient aussi achevés que possible – nous aurions été incapables d’avancer avant qu'ils n’aient étés complètement faits pour le film – alors nous avons dû patienter aussi longtemps que possible. De l'équipe d’effets visuels de Susan Macleod jusqu'aux scénaristes du film, tous ont fait un travail remarquable en ajustant les séquences ensemble. Je ne dis pas que c'est parce que j’ai propagé un certain charisme magique alors que j'étais sur le plateau (je ne l'ai pas fait, j'étais trop occupé à fureter parmi les décors à moitié construits et les Kraft – "van de restauration"), mais cela aide incontestablement, lorsque vous tentez d'obtenir des gens occupés d'ajouter plus de choses à leur liste de choses à faire, que ladite personne occupée sache au moins qui vous êtes. Et, je pense que cela revient à l'un de mes précédents messages – ils savent que vous n'êtes pas un imbécile qui ne sait pas éteindre son téléphone portable lorsque le cri "Action!" retentit sur le plateau.
D'un point de vue personnel, je pense que la partie la plus satisfaisante dans le fait d'être un "collecteur de données" sur ce projet a été d’avoir un certain niveau de surveillance sur presque tous les aspects du jeu. Tout d'abord, je suis assez curieux donc ça a été plutôt cool de voir là où le véritable travail est fait. Auparavant, j’étais strictement axé sur les travaux de commercialisation dans l'industrie du jeu, et j’étais assez bien retiré du tumulte de l’achèvement du jeu. Bien sûr, j'ai été impliqué dans le développement de jeux, mais toujours de l'extérieur. Cette fois, je l'ai vraiment vu de près. Fascinant. Je dois dire, cependant, que je n'ai pas envie de l’observer de plus près. L'équipe de Shiny et l'équipe de production à SEGA doivent travailler comme des démons. Et non “daemons” ;-). Je veux dire, je répartis mon temps de travail équitablement, notamment à travers 3 zones (Côte Ouest des États-Unis, côte Est des États-Unis et Royaume-Uni, avec un peu de temps à perdre au Japon !), Mais quand l’instant où ça craque arrive, le mieux est d’avoir un sac de couchage dans son bureau et de dire adieu à sa vie sociale pendant un certain temps.
Enfin, d'une manière encore plus personnelle, de loin la meilleure chose de ce travail était l’aléthiomètre. New Line nous en a très généreusement prêté deux parmi les accessoires du film. Ce sont vraiment de beaux objets. La première fois que j'ai tenu un, j'ai demandé à Barry Gibb, l'accessoiriste (Oui c'est son vrai nom, et non il ne sort pas des Bee Gees) de quoi il était fait. Ils sont lourds, solides, incroyablement complexes et la maîtrise de leurs finitions est à couper le souffle. J’ai supposé que c’était une sorte de boussole antique du 18ème siècle et j’ai été sidéré quand il m'a dit qu'il les avait fait spécialement fabriquer ! La vraie raison pour laquelle ils sont incroyables, c'est parce que je peux attester de la propriété magique qu’a l’aléthiomètre. J'ai du en amener un à la maison pour ma famille à Noël. Je suis retourné au Royaume-Uni pour les vacances et ai décidé qu'il était plus sûr de transporter à la main celui que le bureau de SEGA Europe avait renvoyé aux Etats-Unis que de l'envoyer par FedEx. Alors j'ai fait un saut par le bureau sur le chemin du retour pour le chercher. Je ne dis pas que ma famille soit ennuyeuse, et que nous n'avons rien d'excitant à faire à Noël – loin de là – mais l’aléthiomètre a été un très grand succès auprès de mes neveux. Un véritable, réel, authentique aléthiomètre. L’espace d’une minute, j'étais cool. Et puis, tout comme mon implication sur le projet, c’est passé en un clin d'œil. Bizarre.